Biographie de François René de la Tour du Pin
François-René de la Tour du Pin, marquis de la Charce, est aujourd’hui devenu un auteur de référence dans la compréhension de la pensée royaliste, notamment sur son aspect économique et social. Fils aîné d’Humbert de La Tour du Pin, marquis de La Charce, et de Charlotte-Alexandrine de Maussion, il est donc issu d’une vieille famille de la noblesse dauphinoise, dans son ensemble restée catholique et royaliste.
François René de la Tour du Pin naquit le 1°Avril 1834 à Arrancy (Aisne). Sur sa jeunesse, nous n’avons que peu d’écrits. Il entre à Saint-Cyr en 1852, alors à peine âgé de 18 ans. Jeune officier, il sert sous le Second Empire en Crimée, en Italie et en Algérie avant de participer à la guerre contre la Prusse en 1870. Fait prisonnier lors de la reddition de Metz en octobre 1870, il sympathise en captivité avec Albert de Mun. En septembre 1871, de la Commune, alors qu’il est encore capitaine aide de camp du gouverneur militaire de Paris, il s’engage, à la demande de Maurice Maignen, fondateur en 1845 des Frères de Saint Vincent de Paul dans l’ « Œuvre des cercles catholiques d’ouvriers » avec ses amis Albert de Mun et Félix de Roquefeuil. Son action est alors inspirée des travaux de Frédéric Le Play. C’est alors qu’il est touché par la situation des ouvriers. Ses écrits politiques sont marqués par cette situation. Plus encore que Lamennais, il est à la source du courant du catholicisme social en France.
En 1877 il est nommé attaché militaire en Autriche-Hongrie et rencontre le comte de Chambord, prétendant légitimiste au trône de France, dans son exil de Frohsdorf. À Vienne il est également marqué par l’influence des catholiques sociaux autrichiens, le plus représentatif d’entre eux étant le baron Karl von Vogelsang (1818-1890) qui anime la revue Vaterland. En 1881, il démissionne de l’armée et se retire sur ses terres d’Arrancy, dont il sera maire. À la mort du comte de Chambord, en 1883, La Tour du Pin reporte sa fidélité royaliste sur l’aîné des Orléans, Philippe, comte de Paris, qu’il rencontre à Eu. Au début 1885, de passage à Rome, il est reçu par le pape Léon XIII. En 1891, contrairement à Albert de Mun, il refuse le ralliement des catholiques français à la Troisième République. Comme le futur maréchal Lyautey, qui publie au même moment son « Rôle social de l’officier« , largement inspiré de l’expérience des « cercles catholiques », La Tour du Pin demeurera fidèle à ses idées royalistes de jeunesse.
En 1892, il rencontre pour la première fois le jeune Charles Maurras, encore républicain, amorce une correspondance qui devait se poursuivre jusqu’à la mort du colonel. Une fois l’Action française fondée en 1899, La Tour du Pin apporte son concours. Il livrera ainsi trois études à la Revue grise d’AF entre 1904 et 1906, sur la noblesse, la représentation professionnelle et l’organisation territoriale de la France. En 1907 il publie son maître livre, imposant recueil d’articles écrits à partir de 1882 : Vers un ordre social chrétien. Le marquis de La Tour du Pin meurt à Lausanne le 4 décembre 1924 à 90 ans révolus.
La pensée de La Tour du Pin aide à la rénovation intellectuelle que connaît le catholicisme en France pendant toute la première partie du XXe siècle : l’Eglise y réaffirme sa responsabilité auprès des plus pauvres et promeut l’engagement des laïcs au service de la cité. L’Action française et Firmin Bacconnier y puisent une bonne partie de leurs idées sociales. Ainsi, comme l’expliquera Charles Maurras : « Ce n’est pas La Tour du Pin qui est à l’Action française, c’est l’Action française qui est à La Tour du Pin. » Les écrits de La Tour du Pin marqueront également le général de Gaulle. En 1970, Edmond Michelet, ministre du général, faisait remarquer à ce sujet « s’il est un personnage que le général de Gaulle connaît mieux que Marx, c’est peut être le très ignoré aujourd’hui La Tour du Pin ».