Chômage : l’erreur du Président, par François Reloujac*
Grande mesure annoncée pour lutter contre le chômage, la baisse des cotisations familiales, saluée par une partie de la presse, est une fausse bonne idée. Personne, au gouvernement, ne semble savoir comme la financer, sans compter ce qu’elle masque en arrière-fond…
Lorsque le président de la République a présenté ses vœux pour ce début d’année 2014, il a dit vouloir « accélérer » la lutte contre le chômage, ce fléau qui gangrène la société depuis plusieurs décennies. Pour cela, il a paru répondre à une demande incessante des entreprises en annonçant une baisse des charges liées au travail, baisse censée procurer plus de compétitivité. Et il a choisi comme point d’application de cette baisse les cotisations familiales. D’où la question : veut-il vraiment lutter contre le chômage ou porter un nouveau coup à la famille ?
Depuis plusieurs années, les charges patronales sont désignées à l’opinion publique comme l’une des causes majeures du manque de compétitivité des entreprises françaises. De ce fait, pour les chantres de cette analyse, les entreprises françaises ont du mal à vendre et dès lors ne sont pas incitées à embaucher. Si ces charges baissent, les entreprises produiront moins cher et pourront donc mieux vendre leurs produits. Dès lors elles seront incitées à croître et embaucheront. Les gouvernements successifs, de gauche ou de droite, ont tous admis sans réserve cette analyse dominante dans le monde des économistes mimétiques. Et chaque fois qu’ils ont présenté un plan de lutte contre le chômage dans les années passées, ils ont tous pris des mesures – ponctuelles et passagères – de baisse des charges sociales. Les économistes qui veulent démontrer le bien fondé de leurs travaux ont chiffré les résultats de ces politiques : 100 000 emplois créés par-ci ; 50 000 emplois créés par-là ! Résultats de calculs économétriques et non d’observations concrètes, ces chiffres ont toujours été bien loin des enjeux réels. Mais ils avaient l’avantage de pouvoir être « communiqués » au grand public et d’aller dans le sens des demandes incessantes des chefs d’entreprise. Médiatiquement, ils étaient donc favorables à l’auteur de la mesure… du moins pendant quelques mois : c’est-à-dire le temps que l’on s’aperçoive que la baisse du chômage n’avait été que limitée et temporaire. Il est vrai qu’une légère baisse des seules charges salariales ne peut pas avoir autant d’effet sur les performances des entreprises à l’exportation que pourrait et devrait avoir une baisse de la valeur de l’euro. Une baisse de la valeur de l’euro aurait aussi un effet positif sur les ventes nationales dans la mesure où elle rendrait plus compétitifs les prix des produits français au regard des produits importés. Comme l’explique Gérard Lafay, toute politique de monnaie chère « pénalise les coûts salariaux et facilite la sortie des investissements directs à l’étranger, tout en suscitant abusivement l’importation ». Mais toucher au dogme de « l’euro fort » est interdit. Europe oblige !