Alstom, l’ultime dépeçage
Lâché par les politiques dans les années 80, affaibli par les fonds anglo-américains dans les années 90 et dépecé par la Commission européenne dans la décennie 2000… L’ancien fleuron français, Alstom, subit la loi d’une guerre industrielle patiente. La vente de sa belle division énergétique à l’américain General Electric ou à l’allemand Siemens en constituerait la phase finale.
C’est l’histoire d’une compagnie enviée qui a équipé 25% des barrages hydro-électriques dans le monde, qui est capable de fournir l’intégralité des composants électriques des centrales à charbon et des centrales nucléaires mais aussi de construire des trains de toutes catégories.
Issu d’anciennes entreprises de constructions mécaniques et de fabricants de moteurs, racheté par la Compagnie générale d’électricité en 1969, Alstom a bénéficié de la grande politique industrielle voulue par le pouvoir gaulliste, dont le TGV sera l’une des réussites posthumes.
Un dépeçage patient
En 1989, suite à la privatisation de la Compagnie générale d’électricité, le français Alsthom fusionne à parité avec le britannique GEC. Dans la décennie suivante, le nouveau groupe est cédé en deux, puis l’activité énergétique est partiellement introduite en Bourse (avec, à la clef, le versement d’un dividende très important aux anciens actionnaires de GEC), avant de fusionner partiellement avec une filiale du concurrent suisse (à capitaux anglo-saxons) ABB dont l’activité se révélera défaillante. Versement de dividende exceptionnel, krach boursier : en 2003, le groupe – qui évolue dans un secteur gourmand en capitaux – se retrouve avec des fonds propres très réduits. Il doit en outre faire face à une crise de liquidités.
Sous le pilotage du ministre Francis Mer, l’Etat français décide alors de sauver Alstom en participant à deux augmentations de capital. Revers de la médaille, la Commission européenne – qui estime cette action contraire à l’esprit des traités – oblige à vendre en contrepartie deux fleurons du groupe : les activités de turbines industrielles et la filiale spécialisée dans la conversion d’électricité. La première ira… au concurrent allemand Siemens, la seconde à la banque Barclays, qui la cédera ensuite … à l’américain General Electric.