Démocratie française, le cancer individualiste
Comment expliquer que, dans notre pays, tant de dérives « sociétales » se produisent au nom de la démocratie, suscitant ainsi divisions et polémiques inextinguibles ? Pour cela, il faut avoir à l’esprit le caractère singulier de notre conception de la démocratie : elle la distingue de celles que nous ont léguées l’histoire et la pensée politique et même de celles qui sont actuellement en vigueur dans le monde.
La démocratie athénienne, paradigme incontournable de nos démocraties modernes, reposait sur une isonomie entre membres d’une même communauté ethnique et culturelle, fort différente de la conception individualiste de l’égalité qui trône au cœur de nos démocraties.
Au Moyen-âge classique, saint Thomas d’Aquin, combinant aristotélisme et christianisme, conçut la démocratie comme un moyen pour le peuple de tempérer un pouvoir monarchique intrinsèquement bon et indispensable, mais susceptible, le cas échéant, d’incliner à la tyrannie, en choisissant les meilleurs (les aristocrates) et des élus appelés à partager le pouvoir avec le souverain. Ordonnée rationnellement au bien commun, la loi humaine, dotée d’une grande capacité d’autonomie, devait se conformer à la loi divine contenue dans les saintes écritures et dont l’église était le garant suprême. Cette conception de la démocratie ne fut, du reste, jamais appliquée.
Nos démocraties modernes, elles, sont essentiellement individualistes. Mais l’individualisme y est tempéré par la prégnance, dans la société, d’une morale qui assure la cohésion de la nation. L’exemple américain est particulièrement révélateur à cet égard.