La Valeur de l’épargne

Valeur de l’épargne

L’Action française, 13 décembre 1925 et 6 juin 1926.

Qu’est-ce que l’épargne ? Un effort de volonté. Rien n’est plus facile que de décourager cet effort. Il suffit que l’inutilité en soit comprise. Et tout le monde comprend qu’il est absurde de consolider des privations dans des images coloriées qui ne rapporteront que des ennuis.

L’épargne, qui s’inspire d’un désir de sécurité, est un acte de foi. Quand la sécurité disparaît, la foi meurt. L’homme n’est que trop porté à jouir. Dès qu’on lui donne l’idée que son bien est précaire, il se paie immédiatement, non pas la vanité d’un quart de Ville de Paris, mais ce qui lui est agréable : alors la consommation augmente et le luxe s’accroît.

Quand la mort du mark est venue, la force organisée des producteurs a été maîtresse de la situation.

Seulement, en Allemagne, cette force était organisée. Elle savait ce qu’elle voulait. Elle le savait en politique aussi. Les producteurs français le savent-ils ? Et puis l’Allemagne avait ce que nous n’avons pas, une autre force organisée, une force matérielle, la Reichswehr, l’armée de métier qui a réprimé tout de suite les soulèvements révolutionnaires qui se produisent dans le douloureux passage de l’inflation à la déflation.

Nous n’avons pas, en France, de véritable organisation des forces économiques. Nous n’avons pas non plus de Reichswehr. Ce sont des choses auxquelles il faudrait penser.

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L’épargne est l’origine du capital comme elle est la justification morale du capitalisme, puisqu’elle représente une privation, un effort et même un sacrifice. Car celui qui ne consomme pas tout ce qu’il a gagné pense aux autres au lieu de penser à lui-même. Il pense à ses enfants, à ses successeurs. Il pense, sans le savoir, à tout le monde. Il n’y a eu de civilisation qu’à partir du jour où des hommes, au lieu de manger tout le gibier de leur chasse et de se gaver, ont fumé ou salé de la viande, ce qui a permis à la tribu de se livrer à d’autres travaux.

L’autre justification du capitalisme, c’est que les capitaux sont périssables, qu’ils s’usent, disparaissent ou meurent comme toutes les choses qui, en dernier lieu, les représentent. Par conséquent, l’épargne ne doit jamais s’arrêter. Si elle vient à cesser, la civilisation perd sa base et son support. Il faut admirer et saluer bien bas cet instinct de l’épargne qui reconstitue à chaque minute avec patience ce que chaque minute détruit.

L’Action française, 13 décembre 1925 et 6 juin 1926.

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