Vincent Peillon et la morale
Je suis au moins d’accord sur un point avec notre ministre de l’Éducation nationale : « Il y a un principe qui s’appelle neutralité de l’État. Il doit s’appliquer dans les établissements d’enseignement sous contrat comme dans les établissements du service publique. » Si Vincent Peillon entend par neutralité le fait que les établissements scolaires ne doivent pas être partie prenante des joutes politiques, qu’ils doivent être un espace préservé pour un savoir objectif, loin des querelles qui affectent la société et la sphère politique, on ne peut qu’acquiescer à pareille sagesse. Le problème c’est que dans la pratique une telle neutralité s’avère très difficile à respecter. Depuis toujours, les enseignants se sont fait l’écho des débats de la place publique. Beaucoup d’entre eux, très engagés idéologiquement, ne se sont pas fait faute de répercuter leurs opinions dans leurs cours. D’une certain façon, pourquoi pas, dès lors qu’ils respectaient la conscience de leurs élèves et admettaient une controverse ordonnée ?
Autre problème. Vincent Peillon, avant même qu’il ne devienne ministre, s’est montré partisan d’une certaine conception de la République, proche des pionniers de la IIIe République. Il s’est réclamé ainsi de l’héritage de Ferdinand Buisson, théoricien de l’école publique, qui entendait transmettre aux enfants de France une certaine conception de la morale. C’est pourquoi je n’ai pas été étonné que le ministre Vincent Peillon ai manifesté son intention de rétablir l’enseignement de la morale à l’école, et d’une certaine façon je m’en suis félicité. Apprendre aux enfants les notions élémentaires du bien et du mal, apprendre le respect de l’autre, celui du bien commun, se disposer à l’entraide, à la solidarité. Oui, mais voilà : si la morale a été abandonnée autour de 1968 dans le monde scolaire, c’est qu’il n’y avait plus de consensus sur ce qu’on appelle les valeurs. Comment le ministre compte-t-il réanimer un tel consensus ?