L’inquiétant rapport Tuot
Régularisation des clandestins, accès facilité à la nationalité française, subventions massives aux associations… Le gouvernement suivra-t-il les recommandations du conseiller d’État, pour lequel “la question musulmane est une invention” ?
Provocation sans lendemain ou stratégie à long terme, le rapport remis le 11 février par Thierry Tuot au premier ministre est un ovni politique. Son auteur, un conseiller d’État de 51 ans, le reconnaît lui-même : « Il se peut qu’on s’étonne […] d’un ton, d’un style et de formes qui manquent au devoir de grisaille sinon de réserve.[…] Il est permis de penser que l’affichage d’un peu de ly risme, le retour d’un peu de rêve, les échos joyeux d’une grandeur qui ne serait plus martiale, mais sociale pourraient s’avérer plus efficaces que la compassion digne […]. En ce qui concerne les immigrés et l’intégration, on l’a compris, la République nous appelle. »
Si le gouvernement répond présent, comme le souhaitent nombre d’associations, au premier rang desquelles France Terre d’asile, qui s’inquiétait du retard pris par Matignon à recevoir et surtout à publier le rapport (téléchargeable en intégralité sur valeursactuelles. fr), c’est à une authentique révolution qu’il faut se préparer.
Jusqu’alors, en gros, l’État tenait les rênes des politiques d’intégration, qui se résumaient essentiellement à la “politique de la ville”, dont la Cour des comptes a récemment souligné les dérives, mais qui avait pour (seul ? ) avantage d’être quantifiable et maîtrisable — à condition de le vouloir. La principale proposition du rapport Tuot consiste à en transférer l’exercice presque exclusif aux associations, le rôle de l’État consistant seulement à les subventionner ! Membre du Haut Conseil à l’intégration et critique impitoyable des professionnels de l’antiracisme, l’universitaire Malika Sorel, elle-même d’origine algérienne, a bien vu le danger : la prise de contrôle de l’argent public par des groupes de pression communautaires. « L’intégration, dit-elle, ne peut être réduite à sa seule dimension socio-économique, en laissant de côté les composantes les plus concernées que sont l’éducation, l’instruction, la famille, les affaires intérieures, l’emploi, les affaires étrangères et les armées. »