[Critique littéraire]L’eau et les châteaux du Poitou historique, par Jean-Paul Charbonneau
Cette étude érudite est aussi un parcours pour découvrir les châteaux poitevins et leur rapport à l’eau, ce qu’en termes savants on appelle l’hydraulique castrale. Un tel travail peut faire école car il procède d’une méthodologie rigoureuse et ne peut être confondu avec un simple guide touristique. Le tourisme « au vert » est à la mode et il conduit les citadins sur des sites multiséculaires qu’ils admirent dans un esprit et une information dérivés des reportages télévisuels grand public façon « Des Racines et des Ailes » au demeurant fort respectables.
Loin de ces survols, Jean-Paul Charbonneau nous explique les enjeux et la problématique de l’eau qui ne sert pas seulement à remplir les douves et à survivre durant les sièges… L’eau est manifestation de pouvoir par le châtelain et de subordination pour ceux qui vivent sur son fief. L’eau génère une vie économique qui procède d’abord de l’autosuffisance mais qui est aussi tournée vers les échanges. A la fin du Moyen Age, dans un contexte politique plus centralisé, lorsque les liens féodaux laissent la place au cadre seigneurial, l’eau apporte confort et agrément de vie. C’est « l’eau futile » de la résidence châtelaine qui séduit les bourgeois-gentilshommes à la recherche de demeures un brin ostentatoires. Tout cela est parfaitement exposé et mène le lecteur à un itinéraire égrené d’une centaine d’étapes, autant de demeures « pittoresques » au bon sens du terme.
A ne pas manquer Bourg-Archambault (Vienne) un peu « gothique-troubadour », les vestiges de Château-Larcher (Vienne) dans un site miraculé des horreurs loties des Trente Glorieuses, Ebaupinaye (Deux-Sèvres) romantique à souhait, La Guillemandière (Vendée), logis vendéen typique, tout comme Maison-Neuve en Vendée, Maisontiers (Deux-Sèvres), château-étang exemplaire, Marçonnay (Vienne), maison-forte de l’évêque de Maillezais et enfin Touffou (Vienne), imposante, composite.
Une manière d’approcher le patrimoine et de la faire vivre pour qu’il échappe à la « disneylandisation » en cours…
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