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Franck Ferrand: «Le Puy-du-Fou est un creuset où se transmet l’amour de l’histoire!»

FIGAROVOX/ENTRETIEN – Le parc à thème vendéen est autorisé à rouvrir ses portes à compter du 2 juin. Cette nouvelle, qui a provoqué l’indignation de certains commentateurs sur les réseaux sociaux, est accueillie chaleureusement par le conteur et écrivain d’histoire Franck Ferrand.Par Paul SugyPublié hier à 11:22, mis à jour hier à 14:00

Franck Ferrand anime des émissions d’histoire à la radio et à la télévision ; il présente aussi sur scène, depuis trois ans, un spectacle intitulé «HistoireS». Son rendez-vous quotidien, «Franck Ferrand raconte» (Radio Classique à 9h et à 14h) est un des plus téléchargés de France. Dernier ouvrage en date: Mon enfance, quelle histoire, entretiens avec Catherine Lalanne (Bayard, 2019).


FIGAROVOX.- Vous faites partie de tous ceux qui, ces dernières semaines, s’étaient mobilisés en faveur du Puy-du-Fou ; l’annonce de la réouverture prochaine du parc a dû vous faire plaisir…

Franck FERRAND.- Oui, c’est un soulagement. Comme le savent des millions de visiteurs français et étrangers qui, plus ou moins régulièrement, fréquentent le parc à thème, comme le vivent des milliers de bénévoles qui, depuis trois générations, donnent vie, soir après soir, à la Cinéscénie, ce qu’il se passe dans ce coin de Vendée est fort, inespéré, en même temps que fragile. Une fermeture trop prolongée aurait pu tuer ou – pire, peut-être – dénaturer ce pôle de tourisme et de culture populaire, plusieurs fois salué et récompensé à l’échelle mondiale.

Si vous deviez décrire le Puy-du-Fou à ceux qui ne le connaissent pas encore, que leur diriez-vous?

Comme toutes les grandes réalisations, celle-ci peut être regardée sous des angles différents: paysager, hôtelier, artistique, événementiel… Certains se contenteront, au sortir d’hôtels évoquant une villa gallo-romaine ou le camp du Drap d’Or, de la résurrection prenante d’un village ancien et du spectacle de rapaces tournoyant au-dessus de leur tribune ; d’autres se laisseront envoûter par la reconstitution d’un cirque antique, de drakkars vikings ou d’une lice de chevalerie, voire par des machineries comparables à celles que propose Las Vegas: ainsi pour le grand spectacle consacrée au général Charette, «Le dernier Panache», c’est une salle de plusieurs centaines de fauteuils qui tourne sur elle-même! Les plus férus d’histoire prendront plaisir à s’immerger dans les univers de Clovis ou de La Pérouse, et pousseront l’expérience jusqu’à circuler dans une tranchée de Verdun… Que voulez-vous, cet endroit est une machine à faire aimer l’histoire! Or, rien de tout cela, probablement, n’aurait vu le jour, sans la grand-messe nocturne que représente, depuis 1979 – avec ses illuminations, ses tableaux vivants, ses effets spéciaux et ses milliers de figurants, humains et animaux – la célèbre cinéscénie. J’ai des amis qui en connaissent le texte par cœur, et se le récitent, à voix basse, pendant la représentation… Le Puy-du-Fou, c’est un peu tout cela, et c’est davantage encore ; tant il est vrai qu’on peut difficilement réduire un tel ensemble à ses diverses composantes.Tout le monde devrait pouvoir saluer l’extraordinaire réussite du Puy-du-Fou.

Nombreuses sont les critiques à propos d’un certain favoritisme présidentiel, dans cette affaire. Y aurait-il eu, selon vous, «deux poids, deux mesures»?

Au-delà du soutien d’Emmanuel Macron, il semble qu’avant de décider la réouverture, les pouvoirs publics aient pris en compte bien des aspects, notamment la situation géographique du Puy-du-Fou, en pleine zone verte… Mais je comprends la frustration de certains, et ne puis qu’inviter les Puyfolais à faire preuve de tact ; par respect pour ceux qui vont pâtir encore de la prolongation des interdictions sanitaires, il convient d’avoir le triomphe modeste. Plus généralement, les mesures de précaution adoptées depuis deux mois me paraissent cher payées, notamment pour la culture. J’imagine, je veux croire du moins, que les autorités vont faire leur possible pour secourir les institutions et les manifestations, grandes et petites, qui font la richesse, qui font l’attrait de notre pays. Certains festivals sont irremplaçables, vous savez. Et quand je vois, pour ne citer qu’un haut-lieu à titre d’exemple, que l’Opéra de Paris est aujourd’hui en grande difficulté, je me sens pris de vertige. D’autres mobilisations sont à prévoir!

Enfin, que répondez-vous à ceux qui dénoncent, dans le Puy-du-Fou, une entreprise de propagande politique, voire d’endoctrinement?

Il vaut mieux en sourire. La personnalité du fondateur, Philippe de Villiers, n’est certes pas très consensuelle ; c’est un homme de convictions fortes, d’enthousiasme et de lyrisme, et qui n’a jamais eu peur d’évoquer, notamment, la tache que fait la guerre de Vendée sur le roman national… Cela ne peut pas plaire à tout le monde – mais je crois qu’en revanche, tout le monde devrait pouvoir saluer l’extraordinaire réussite du Puy-du-Fou, ainsi – et c’est le plus important – que le rôle salutaire de ce creuset si singulier, si détonnant même, quant à la transmission d’un certain amour de l’Histoire, notamment aux plus jeunes.

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