Pour le centenaire de Kléber Haedens
A l’instar d’un Vaugeois, Bainville ou Maulnier, Kléber Haedens fait partie de ces écrivains de talents qui furent passés sous silence pour leurs accointances avec le mouvement Maurrassien, l’Action Française. Leur réhabilitation dans les esprits français reste longue, lente et spartiate, comme en témoigne le scandale fait par quelques petits esprits centristes en 2008, quand le Maire UMP de la Garenne Colombes voulait baptiser un collège du nom de Kléber Haedens…
Celui-ci naquit le 11 Décembre 1913, à Equeurdreville, au sein d’une famille de militaire, pétri d’un conformisme qu’il exècrera toute sa vie, comme il l’écrivit au sein de deux ouvrages, L’Ecole des Parents (1937) et Adios (1974). Il fit ses études au Prytanée de la Flèche puis, après une école de commerce à Bordeaux, s’élança sur la voie abrupte du journalisme en intégrant des journaux célèbres comme Aux Ecoutes, Je suis Partout et, bien évidemment, le quotidien L’Action Française, dont il tiendra les chroniques sportives et littéraires.
Comme l’ensemble de la Presse, Kléber Haedens se réfugie à Lyon lors de la Seconde Guerre Mondiale, devenant avec Michel Déon, l’un des secrétaires de Charles Maurras. Mais c’est par la confiance d’un jeune éditeur, René Julliard, qu’il connaîtra la postérité. Charmé par le ton atypique de Paradoxe sur le roman (1941), l’éditeur commande à l’écrivain son Histoire de la Littérature Française, qui restera l’un de ses ouvrages les plus remarquables et remarqués, de par l’éloquence de sa critique et l’originalité de ses jugements.
A la libération, le journaliste reprend sa plume dans les journaux nationalistes, comme Aspects de la France (successeur de l’Action Française, interdite), Paroles Françaises, France Dimanche, Paris Presse et au Nouveau Candide. Son ouvrage d’après guerre, Salut au Kentucky (1947), sera d’ailleurs salué par Sacha Guitry et René Benjamin, qui lui remettront le fameux « Goncourt hors Goncourt »… Mais Kléber Haedens fut bien plus qu’un simple critique littéraire : écrivain de talent, il fit partie de cette belle école littéraire des « Hussards », en compagnie de Michel Déon, Roger Nimier et d’Antoine Blondin notamment.
Salué en 1966 par le Prix Interallié pour L’Eté finit sous les tilleuls, ce fut par le Grand Prix du Roman de l’Académie Française, remis à son ouvrage Adios (1974), qu’il connut la consécration, deux ans à peine avant de rendre son âme à Dieu. Aujourd’hui méconnu, Kléber Haedens commence à retrouver sa place légitime au sein de la littérature française, une place qu’il n’aurait jamais dû quitter.