De la réponse royaliste aux inepties communistes
L’une des meilleures manières d’étrenner nos connaissances politiques, économiques et sociales reste sans nul doute la confrontation directe avec les ardents défenseurs de l’extrême opposition, les débats en bonne due forme avec nos détracteurs les plus brillants. En ce sens, les extrêmes républicains (gauche et droite) sont les plus simples pour commencer : extrêmes dans leurs positions, extrêmes dans leur égarement, extrêmes dans leur réaction d’ailleurs.
Ce Vendredi 13 Janvier à 20 h 30 était organisée à Pontivy une conférence par l’économiste Nicolas Benies, co-auteur du Manifeste des économistes atterrés et qui ne cache pas sa vive sympathie pour une certaine idée de la « révolution des peuples européens face à la dictature de l’oligarchie politicienne et libérale ». Intéressante et instructive, cette conférence permet de montrer qu’en politique, le manichéisme reste une aberration. Donc commençons par les points positifs de cette conférence :
- Une analyse économique pertinente de la crise et une certaine remise en cause de l’usure : l’argumentaire, précis et documenté, est évidemment intéressant à écouter. La démonstration des limites de l’ultra-libéralisme et des abus d’une certaine partie de cette oligarchie économique ont malheureusement été développé selon un certain parti pris politique du conférencier mais le constat est dans son ensemble assez bien dressé, bien qu’incomplet sur certains points, nous y reviendrons.
- Une analyse politique intéressante : le conférencier a notamment développé le manque cruel de réponses politiques, économiques et sociales face aux politiques actuelles. S’il ne parlait sans doute pas de la voix royaliste, son constat reste pertinent à 100 jours des présidentielles françaises : pas de réelles alternatives à l’oligarchie aujourd’hui en place.
- Une certaine lucidité sur la crise morale actuelle : s’il faut bien sûr faire attention à ce terme quand il est utilisé par des sympathisants d’extrême gauche, on ne peut que regretter avec eux l’abandon des plus pauvres (notamment par les rabotages des aides de l’Europe pour les plus démunis) et le manque de solidarité.
Maintenant que nous avons dressé le bilan positif de cette soirée, rentrons dans le vif du sujet et montrons l’ineptie profonde du discours.
Les réflexions économiques et politiques du conférencier se fondent sur un anti-nationalisme véhément, un évolutionnisme européen poussé à l’extrême et donc aberrant, un manque cruel de lucidité sur les limites de l’Etat Providence français surtout un manque de clairvoyance sur le vrai visage du capitalisme, tel qu’il fut développé par des auteurs royalistes comme Antoine Blanc de Saint Bonnet ou Jacques Bainville.
En premier lieu, l’anti-nationalisme des adeptes de la faucille et du marteau se manifeste par une haine viscérale de toute solution nationale, toute idée d’une Nation française unie qui pourrait trouver en son sein les ressources pour sortir de la crise. Préférant développer l’idée d’une démocratie européenne, un ultra fédéralisme annihilant toute notre identité nationale, le conférencier appuie son constat sur un évolutionnisme européen extrême (on ne regarde pas les erreurs du passé et on ne revient pas sur ce qui a été fait).
On pourrait répondre de nombreuses choses à ces inepties : en voici quelques unes.
- L’évolutionnisme européen est en lui-même d’une dangereuse bêtise. La construction européenne de Maastricht de 1992 (où même les communistes avaient appelé au non) a été une énorme erreur, consacrée par la Monnaie unique européenne qui aujourd’hui plombe toute relève des économies nationales. Que dire de la réaction anglaise qui ne cesse de prendre ses distances avec le fédéralisme européen de ses voisins ?
Quand cela reste possible, ne pas revenir sur les erreurs d’hier relève du masochisme politique le plus aberrant. Aujourd’hui, l’édifice européen s’écroule : faut-il continuer à l’élever malgré l’évidente ruine à court terme ou le reconstruire sur des bases solides ? La construction d’une véritable Union des Nations Européennes ne peut se faire qu’avec comme bases des Nations souveraines solides, unies et fondées sur la charité et la solidarité nationales.
- La pluralité des réactions nationales des pays européens montrent qu’il est impensable de gouverner uniformément des Etats-Nations, en bafouant leur culture, leur histoire, leur identité, leur langue et leur souveraineté même. Cette haine des nationalismes est la même que la haine des régionalismes des révolutionnaires français : en bafouant les particularités régionales, en détruisant toute communauté d’intérêts et de souvenirs, elle isole les individus et produit l’extrême inverse de cet idéal de solidarité que nous présente les communistes.
On pourra d’ailleurs citer Amouretti qui écrivait, sur le nationalisme jacobin : « En adoptant le plan de Sieyès, et en découpant la France comme matière inerte en départements tracés arbitrairement sur la carte, la Convention a anéanti ces admirables cadres historiques où les hommes, unis par l’identité des souvenirs, de la langue, des mœurs, des intérêts pouvaient bien s’entendre pour s’occuper de tout ce qui les touchait de près. »
En second lieu, le conférencier et, de manière plus générale les socialistes de tout poil, croient encore au chimérique Etat Providence, cette protection sociale qui pourrait fournir aux français l’argent nécessaire sans qu’ils aient besoin de produire un quelconque effort économique ou social d’ailleurs. Quitte à poser l’assistanat comme axiome politique.
Voici deux citations qui résument à elles seules l’aberration de cette pensée économique :
- Firmin Bacconnier dans les Assurances Sociales : « Mais poser l’assistance comme principe de l’ordre économique et social, est une grosse erreur. On tue ainsi cet esprit de prévoyance et d’épargne, qui est à la base du développement économique, du progrès social et de l’affranchissement des personnes. L’assisté dépend de celui qui l’assiste. Il n’est pas libre : Assistance, c’est sujétion. Cela présente des avantages pour un gouvernement électif, qui trouve ainsi chez les assistés des électeurs dociles. Mais pour le pays les inconvénients sont immenses. »
- Jacques Bainville dans les Assurances Sociales et Allocations : « Les derniers croyants, les fétichistes de la rente, sont les négateurs du capital. Ce sont les socialistes, socialisants et étatistes de toute sorte qui ne sont jamais las d’élaborer des systèmes de retraites, de pensions, d’assurances sociales, systèmes essentiellement fondés sur le revenu et sur les capitalisations d’intérêts et qui partent de cette illusion que la richesse existe en soi, qu’elle est indestructible et éternelle, qu’elle échappe à toutes les causes de décrépitude, de maladie et de mort qui frappent les choses humaines. Debemur morti nos nostraque (« Nous sommes voués à la mort, tout comme nos biens»). Voilà ce qu’ils méconnaissent. Et ils oublient autre chose. Le capital est deux, fois moral, d’abord parce que, pour le former, il a fallu une épargne, c’est-à-dire un effort et une privation, ensuite parce qu’il est indispensable, pour qu’il dure, de le reconstituer à toutes les minutes, étant donné qu’il s’use à chaque minute comme les matières et les matériaux qu’en dernière analyse il représente. »
Les partisans de l’extrême gauche, parce qu’ils exècrent à raison la chrématistique commerciale (profits d’une oligarchie) à laquelle ils assimilent la totalité du capitalisme, se fourvoient dans des errements économiques et sociaux profondément dangereux car intrinsèquement nihilistes. Le capitalisme, quand il est raisonné, moral (cf. Bainville), au service d’une économie naturelle (épanouissement de tous) est véritablement bon pour le peuple et pour les Nations.
Mais surtout, cette solidarité qui motive chacun de leur geste ne trouvera aucun écho dans un Etat omnipotent et omniprésent. La véritable solidarité sociale, économique et naturelle ne se trouve que dans le régime corporatif, respectueux des libertés populaires et régionales, dans le cadre d’une Nation française forte, unie autour du Roi de France.
Pour conclure, on pourra lire ce paragraphe tiré des origines de l’Action Française, conférence donnée par Alain Raizon de Cleuziou le 29 Janvier 1906 :
« La crise que traverse la France n’est pas seulement religieuse ou sociale, ou économique, ou militaire, ou diplomatique, elle est tout cela et encore autre chose, elle est nationale. Il s’agit de savoir si la France restera la France, c’est-à-dire une grande nation catholique puissante et sagement ordonnée. Depuis que nous sommes en République, que les principes révolutionnaires peuvent agir sans être contrariés, nous descendons progressivement vers l’anarchie, c’est- à-dire vers la barbarie. Il n’est pas un républicain, s’il est bon Français, qui refuse de se demander si vraiment la cause de cette décadence ne tient pas au vice même du régime ? Nos savants, nos artistes, nos littérateurs, nos officiers, nos commerçants ne sont pas inférieurs, à ceux de l’étranger, souvent ils leur sont très supérieurs. Ce n’est donc pas l’intelligence française qui est frappée d’impuissance, c’est le régime qui empêche le génie national de porter ses fruits naturels »