Maximes et pensées de Sa Majesté le Roi Louis XVI.
Maximes écrites de la main de Louis XVI.
I
Il ne dépend pas toujours du Roy de rendre ses sujets heureux ; mais il dépend toujours de lui de s’en servir utilement, en les employant à ce qu’ils savent faire.
II
Faire du bien, entendre dire du mal de soi patiemment, ce sont là des vertus de Roy.
III
Faire du bien aux autres, c’est en recevoir soi-même.
IV
La meilleur manière de se venger, est de ne point ressembler à celui qui nous fait injure.
V
Celui qui refuse d’obéir à la raison universelle et politique, c’est-à-dire à la Providence, ressemble à un esclave fugitif ; celui qui ne la voit pas est aveugle.
VI
Il ne faut pas recevoir les opinions de nos pères comme des enfants, c’est-à-dire par la seule raison que nos pères les ont eues et nous les ont laissées, mais il faut les examiner et suivre la vérité.
VII
Etre heureux, c’est se faire une bonne fortune à soi-même, et la bonne fortune, ce sont les bonnes dispositions de l’âme, les bons mouvements et les bonnes actions.
VIII
Il faut recevoir les bienfaits de ses amis, sans ingratitude et sans bassesse.
IX
Une franchise affectée est un poignard caché.
X
Donnons à tout le monde ; plus libéralement aux gens de bien, mais sans refuser le nécessaire à personne, pas même à notre ennemi ; car ce n’est ni aux moeurs, ni au caractère, mais à l’homme que nous donnons.
XI
C’est une grande ressource que le témoignage d’une bonne conscience.
XII
La Religion est la mère des vertus ; le culte que l’on doit à Dieu doit être préféré à tout.
XIII
Pour aimer, il faut connaître ; pour connaître, il faut éprouver. Je ne donne mon amitié qu’avec une extrême précaution.
XIV
Les mauvais musiciens et les mauvais poètes sont insupportables à ceux qui les écoutent ; mais la nature les a mis en possession d’être enchantés d’eux-mêmes.
XV
Applaudir aux injures, goûter le plaisir de la médisance, quoiqu’on n’en fasse pas soi-même les frais, c’est devenir coupable.
XVI
Les querelles de parti ne sont que des étincelles passagères, quand le souvenir ne s’en mêle pas ; elles deviennent des incendies et des meurtres, lorsqu’il leur donne du poids.
XVII
Les fausses marques d’estime et d’amitié semblent permises en politique, mais elles ne le sont jamais en morale ; et, à bien les examiner, la réputation de fourbe est aussi flétrissante pour un prince, que nuisible à ses intérêts.
XVIII
Un prince avare est pour les peuples comme un médecin qui laisse étouffer un malade dans son sang ; le prodigue est comme celui qui le tue à force de saignées.
XIX
Quiconque veut assujétir ses égaux, est toujours sanguinaire ou fourbe.
XX
La mauvaise fortune est aussi le thermomètre qui indique en même temps le refroidissement de ses amis.
XXI
C’est dans l’âme de Marc-Aurèle, bien plus que dans ses maximes, qu’il faut juger l’homme et le monarque.
XXII
Un ouvrage écrit sans liberté ne peut être que médiocre ou mauvais.
XXIII
Une chose ne mérite d’être écrite qu’autant qu’elle mérite d’être connue.
XXIV
L’institution du soldat est pour la défense de la patrie ; le louer à d’autres, c’est pervertir à la fois le but du négoce et de la guerre ; s’il n’est pas permis de vendre les choses saintes, eh! qu’y a-t-il de plus sacré que le sang des hommes?
XXV
En politique, on devrait faire un recueil de toutes les fautes que les princes ont faites par précipitation, pour l’usage de ceux qui veulent faire des traités et des alliances. Le temps qu’il leur faudrait pour les lire, leur donnerait celui de faire des réflexions qui ne sauraient que leur être salutaires.
XXVI
Il faut distinguer la flatterie de la louange. Trajan était encouragé à la vertu par le panégyrique de Pline. Tibère était confirmé dans le vice par les flatteries des sénateurs.
XXVII
Les fléaux célestes ne durent qu’un temps ; ils ne ravagent que quelques contrées, et les pertes, quoique douloureuses, se réparent : mais les crimes des roys, font souffrir longtemps des peuples entiers.
XXVIII
Les princes de Machiavel sont comme les dieux d’Homère que l’on dépeignait robustes et puissants, mais jamais équitables. Louis Sforce avait raison de n’être que guerrier, parce qu’il n’était qu’un usurpateur.
XXIX
Il serait à souhaiter pour le bonheur du monde, que les roys fussent bon, sans être cependant trop indulgents, afin que la bonté fut en eux toujours une vertu et jamais une faiblesse.
XXX
Un roy qui règne par la justice, a toute la terre pour son temple, et tous les gens de bien pour ministres.