Près d’Avranches: le Château du « Colonel Armand »
Le château de la Rouërie est le berceau d’un héros de l’indépendance américaine. Cet été il ouvre pour la première fois ses portes aux visiteurs.
En venant de Montanel, aux confins de la Normandie, le passage de la « frontière » bretonne est imperceptible dans la continuité du paysage bocager. Seule une stèle en granit gris sur le bord de la route rappelle que Saint-Ouen-la-Rouërie fut la première commune bretonne libérée par les Alliés en 1944. “Mon arrière-grand-mère a reçu la visite d’une jeep américaine. Les soldats lui ont demandé si c’était bien ici le château du colonel Armand”, relate comme une anecdote familiale Diego Barbier, 8e génération des propriétaires du domaine.
A cheval entre Normandie et Bretagne
Aux Etats-Unis, pays à l’Histoire courte mais à la mémoire longue, le marquis Armand-Charles Tuffin de la Rouërie est aussi connu que Lafayette. Le château de la Rouërie date du 15e siècle mais a été remanié au 17e et 18e siècle. Sa façade néo-classique et ses pierres apparentes donnent du charme à cette demeure à taille humaine. Orienté Est-Ouest, le château trône dans un domaine de 100 hectares qui a la particularité d’être à cheval sur l’Ille-et-Vilaine et la Manche. “Juste derrière le château passe le chemin dit de Normandie”, souligne Diego Barbier. Dans le parc, pousse un des premiers tulipiers de Virginie planté en France. “Le marquis en a ramené plusieurs des Etats-Unis, offerts par Georges Washington. Il n’en reste plus que deux dans la région, un dans le domaine et un second au château de la Motte à Saint-Brice-en-Coglès où il s’est marié.”
Le dernier Français à quitter l’Amérique
Le marquis débarqua aux Etats-Unis en 1777 à l’âge de 26 ans. Ne voulant pas combattre dans l’armée continentale sous son titre de noblesse, le Congrès américain l’appela “Colonel Armand”, surnom qui est depuis resté gravé dans les manuels d’histoire Outre-Atlantique. Très vite une amitié se noua entre Georges Washington et le marquis. Mais des dissensions naquirent entre le Français et des officiers américains. De la Rouërie fut autorisé à commander sa propre “armée” “la légion Armand”. Le marquis participa à toutes les campagnes jusqu’à la bataille décisive de Yorktown qui vit la capitulation des Britanniques. Il fut le dernier Français à quitter l’Amérique et en 1783 est promu brigadier-général par le Congrès sur la demande de Georges Washington. Le marquis est également décoré de l’ordre de Cincinnatus.