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Camus et le terrorisme

Camus et le terrorismeL’écrivain, dont on fête les 100 ans, est plus actuel que jamais. Notamment par son éloge de la mesure, son refus de la violence ­totalitaire, et son courage intellectuel.

«Très tôt, Camus a été fasciné par cette déesse [Némésis, déesse de la justice, Ndlr] et il est le seul penseur récent à lui avoir manifesté autant d’intérêt. La justice pour lui, c’est la mesure au sens des Grecs. La mesure, mentron, comme ce qui s’oppose à l’hubris, enchaînement incontrôlé des passions et de la violence verbale ou physique. » Cette réflexion du philosophe Jean-François Mattéi, Jean ­Monneret l’a choisie pour illustrer le propos de son dernier livre, l’excellent Camus et le terrorisme (voir ­l’encadré ci-dessous). Ce goût de la mesure est un des fils rouges de la vie du philosophe.

Contre vents et marées, contre le conformisme marxiste de son époque, Albert Camus (1913-1960) refusera toujours la justification de la violence. « Je ne puis croire, écrit-il en 1943, qu’il faille tout asservir au but que l’on poursuit. Il est des moyens qui ne s’excusent pas. » Ce sera sa ligne de conduite face à certains résistants, face aux communistes, face à Sartre, face au FLN. Au résistant Emmanuel d’Astier de la Vigerie qui lui reproche sa « non-violence », il répond : « Je ne dirai donc point qu’il faut supprimer toute violence, ce qui serait sou­haitable mais utopique. Je dis seulement qu’il faut refuser toute légitimation de la violence, que cette légitimation lui vienne d’une raison d’État absolue ou d’une ­philosophie totalitaire ».

Dans L’Homme révolté, en 1951, il enfonce le clou. L’écrivain y critique radicalement le totalitarisme communiste, fustigeant la révolution rouge qu’il relie à la Terreur de 1793, dénonçant ce « répugnant scandale » qui consiste à présenter l’exécution d’« un homme faible et bon » comme un « grand moment de notre Histoire ». Intolérable ! Sartre, qui dirige Les Temps modernes, sonne la charge et envoie au feu un de ses porte-serviettes, Francis Jeanson, qui va longuement, laborieusement, dézinguer le livre. Toute la rive gauche suit, au garde à vous. Thèse dominante : on ne peut associer la violence bourgeoise, rétrograde, à celle des révolutionnaires, qui aide l’Histoire – avec un grand H – à s’accomplir. Camus a déserté son camp, il tourne le dos à l’Histoire…

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