Le bel enfumage de la Clause générale de compétences des collectivités
S’il fallait résumer le pas de deux républicain autour de la question de la décentralisation, le principe de la clause générale de compétences pourrait, à lui seul, en démontrer l’absurde et le grotesque. Principe mis en place au niveau communal par la loi de 1882, étendu aux autres collectivités territoriales en 1982 par la Loi Deferre, la clause générale de compétence traduit la capacité d’initiative d’une collectivité dans un domaine de compétences au-delà de celles qui lui sont attribuées de plein droit, sur le principe de la défense de « l’intérêt local ».
De fait, sur le papier, rien à redire, le principe décentralisateur semble même fonctionner à merveille. Témoin, pour les républicains, le nouveau transfert de compétences entre l’Etat et les collectivités par la Loi du 13 Août 2004. Or, son application relève souvent du parcours du combattant, notamment par les doublons qu’elles suscitent : certains travaux peuvent, par exemple, relever de l’intérêt de la commune, mais également de celui du département et de celui de la région… D’où de véritables situations ubuesques, dans la plupart des cas.
Sans compter la remise en cause occasionnelle de ce principe :
« Le transfert de compétences d’attribution était vu par le législateur comme une barrière à l’intervention de l’État, dans les domaines qui devaient être la vocation des collectivités territoriales. Ce raisonnement a été clairement ébranlé par le Conseil constitutionnel dans une décision du 7 juillet 2005, portant sur une loi qui confie au préfet de département la définition des zones de développement éolien.
L’interprétation faite par le Conseil constitutionnel, va à l’encontre d’une action subsidiaire et énonce ainsi « qu’il résulte de la généralité des termes retenus par le constituant que le choix du législateur d’attribuer une compétence à l’État plutôt qu’à une collectivité territoriale ne pourrait être remis en cause, sur le fondement de [72-2] ». Cette décision est primordiale, car le Conseil constitutionnel énonce que les collectivités territoriales n’ont pas le monopole d’action dans les domaines d’aménagement du territoire. Et affirme a contrario que l’État a une compétence générale dans l’ensemble des domaines, pouvant se superposer aux domaines d’attribution des collectivités territoriales. »1
La Loi du 16 Décembre 2010 ôtait de facto cette clause de compétence générale aux départements et régions, en leur notifiant qu’ils devaient régler les affaires de leurs collectivités respectives « dans les domaines de compétence que la loi leur attribue ». Rétablie par la Loi de Modernisation de l’Action Publique Territoriale et d’Affirmation des Métropoles du 27 Janvier 2014, elle semble vouée à une probable suppression, comme l’a stipulé le nouveau Premier Ministre Manuel Valls lors de son discours de Politique Générale du 8 Avril 2014.
En clair, la république ne sait sur quel pied danser sur le thème de la décentralisation. Incapable de poser une véritable politique décentralisatrice sur le long terme, elle multiplie les brassages d’airs pour camoufler son intrinsèque incompétence. Comme disait Maurras :
« L’État français sera conçu non pas moins « un », sans doute, mais uni suivant des principes plus souples, plus conformes aux richesses de sa nature, plus convenables à nos mœurs, et qui établiront une meilleure division du travail politique. Aux communes les affaires proprement communales, les provinciales aux provinces ; et que les organes supérieurs de la nation, dégagés de tout office parasitaire, président avec plus d’esprit de suite et de vigueur à la destinée nationale. »
1 Document IFRAP du 7 Mai 2014, Thomas Fallou, Suppression de la clause générale de compétence : les écueils, les enjeux