Le mariage homo vu de province
Le projet de loi sur le mariage homosexuel suscite de nombreuses questions et trouble l’opinion. “Les mots ont un sens.” Choses vues et entendues en Mayenne.
Une réunion publique n’est pas un sondage, et Ernée n’est pas la France : juste une petite commune de 6 000 habitants, chef-lieu de canton d’un département rural, la Mayenne, qui vit surtout de l’agriculture et de l’industrie agroalimentaire. Mais que trois cents personnes s’y pressent pour discuter du mariage homosexuel pendant trois heures et demie souligne l’intérêt que les Français portent à ce projet controversé. Il fait nuit, et il fait froid en Mayenne ce jour-là, mais bien des participants ont fait 20 ou 30 kilomètres pour se retrouver là.
C’est le cas de Gérard, 58 ans, maire d’une commune de 1 500 habitants : « Des mariages, nous en célébrons dix ou quinze par an. C’est à chaque fois un événement familial et une fête locale. Le projet du gouvernement ? Il est plutôt contre : « Il y a déjà le pacs. On peut l’améliorer. Pourquoi pas une union civile accordant de nouveaux droits fiscaux et sociaux aux homosexuels… Mais le mariage, c’est quand même l’union d’un homme et d’une femme. » D’autres maires de communes rurales insisteront au cours de ce débat sur la portée symbolique du mariage, sur sa résonance sociale.
Fonctionnaire territoriale, Martine n’est pas hostile au mariage (« ça ne me dérange pas ») mais elle se pose des questions sur la filiation : « Là, ça m’ennuie un peu : que se passera-t-il s’il y a séparation ? divorce ? Tout cela est encore flou. Je suis venue pour m’informer. » Comme Dominique, un agriculteur de 46 ans : « On a souvent affaire à des lobbyistes, de part et d’autre. Il n’y a pas eu de débat de fond… »