Le décalage entre pays légal et pays réel va croissant
Article très intéressant à lire sur le site du Centre Royaliste d’Action Française :
Nous avons demandé à Frédéric Rouvillois, professeur de droit à Paris-V et spécialiste de la Ve République de se pencher sur l’abstention, vainqueur paradoxal des élections législatives. Il a bien voulu répondre à nos questions.
Les dernières élections législatives ont connu un record d’abstention : quelque 42 % au premier tour, 44 % au second. Comment analyser ce phénomène ?
Frédéric Rouvillois – Le phénomène de l’abstention est évidemment complexe – plus, encore que celui du choix du candidat. On peut ne pas aller voter pour d’innombrables raisons, parfois futiles, lorsqu’il fait beau, trop mauvais, ou qu’on est parti en vacances, parfois plus sérieuses – et la science politique oppose ainsi une abstention de consensus à une abstention contestataire de refus du système. Mais avec le cas particulier de l’abstention aux élections législatives, il y a tout de même un élément significatif, qui permet d’éclairer le phénomène : c’est le fait qu’il se répète et qu’il amplifie à chaque consultation. Au début de la Ve République, la participation à la présidentielle et aux législatives était à peu près équivalente, avec un avantage pour ces dernières : même si le président a déjà pris une place prépondérante, les Français sont encore habitués à considérer, comme sous la IIIe et la IVe républiques, les élections législatives comme les seules vraies élections politiquement déterminantes : les élections par excellence. Mais à partir des années 70 et 80, les Français perdent cette habitude, tout en prenant de plus en plus conscience que le pouvoir n’est plus au Palais-Bourbon, mais à l’Élysée. Voilà pourquoi la participation aux législatives commence de décliner, alors qu’ils continuent de voter massivement à la présidentielle : on va voter lorsqu’il y a un véritable enjeu. Lorsque que ça n’est pas le cas, on préfère rester chez soi devant Michel Drucker, ou aller à la pêche..