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Des poids et mesure ou de l’unification des jugements.

La république, la liberté ou la mortTribune de Paul de Millières parue dans le dernier numéro de Prospectives Royalistes de l’Ouest, à télécharger gratuitement ici.

Parmi les bienfaits que la grande Révolution a apportés à la France, l’unification des poids et mesures a fait faire un grand pas à la notion d’égalité des territoires et des individus. En effet, ce qui mesurait une toise ici et une coudée là, soumis à l’arbitraire de la coutume, n’était plus tolérable. Ce n’est pas à l’Etat de se soumettre à de quelconques particularismes mais à chaque particulier de se soumettre à l’Etat. La république actuelle, héritière de la Révolution ainsi qu’elle le revendique a su étendre ce principe à de nombreux domaines de la vie quotidienne. Parmi les droits fondamentaux dont nous disposons encore aujourd’hui, on peut souligner la liberté d’expression qui était aussi chère à Chateaubriand que la monarchie légitime. La Liberté d’expression permet à qui le veut d’exprimer librement son opinion sur quelque idée que ce soit sans en être inquiété par les autorités. Dans les exemples récents et même s’il paraît que le temps passe de plus en plus vite, ce qui s’est passé il y a un ou deux ans reste tout de même récent, c’est au nom de la liberté d’expression qu’a été exposé le Piss Christ, qu’ont été joué la pièce de Castelucci : Sur le concept du visage du Christ et le fameux Golgotha pic nic dont des extraits seront sans doute bientôt présentés à l’oral de l’épreuve anticipée de français par quelques professeurs de lettres désireux de montrer ce dont est capable l’audace de la littérature contemporaine et le spectacle vivant au lieu de se pencher sur le spectacle mort et la littérature obsolète.

C’est au nom du même droit d’expression heureusement garanti par nos bienfaisantes lois que des gens qui se sont senti outragés par ces œuvres et spectacles, ont pu manifester leur désapprobation à leur endroit. On eut hélas alors à déplorer de bien tristes dérapages mettant en lumière que ceux qui ne veulent pas que l’on touche à l’image du Christ en le plongeant dans l’urine ou en maculant l’image de son visage de peinture figurant des excréments sont extrémistes : certains ont lancé de l’huile de vidange sur des spectateurs et d’autres ont voulu interrompre une représentation. Honte à eux. Leurs coreligionnaires n’ont fait que prier jour après jour et sans succès vu que ces spectacles subventionnés par l’Etat, c’est à dire par les impôts des citoyens, ci-devant se croyant offensés,  devaient bien accomplir leur œuvre jusqu’au bout. Heureusement que le directeur du théâtre de la Ville a pu expliquer que ces gens qui se disaient chrétiens n’avaient rien compris aux spectacles en question et que s’ils les avaient vus ils se seraient rendu compte qu’il transmettaient mieux le message du Christ que les chrétiens eux-mêmes.

            Il a été diffusé sur internet depuis des mois et des mois des fragments d’un film assez mal tourné et assez mal joué qui dit des choses pas très sympathiques sur une religion née au septième siècle et qui fait beaucoup parler d’elle ces temps-ci. Ce film laisse entendre que la religion en question porte en elle le germe de la violence. Pour protester contre cette injure qui leur est faite les adeptes de la dite religion ont tenu à protester en tuant l’ambassadeur des Etats-Unis présent dans l’un des pays où cette religion est pratiquée. Il y a eu par la suite les jours qui ont suivi de nombreuses manifestations diverses et variées avec des actes de violence divers et variés. Au nom de la liberté d’expression un cinéaste a bien le droit de tourner un film assez mauvais. Au nom de la liberté d’expression des adeptes d’une religion ont bien le droit d’assassiner un ambassadeur.

            Il y a des faits et il y a la façon dont la presse les relaie. Que n’a-t-on pas dit sur les deux pauvres égarés et leur huile de vidange que n’a-t-on pas dit sur ces manifestants hivernaux qui chantaient des ave Maria dans la nuit d’automne ?  Mais tendez l’oreille et écoutez tout le mal qu’on dit de l’auteur du film incriminé aujourd’hui. C’est lui le méchant, lui le dangereux intégriste. C’est normal qu’il y ait des réactions violentes : il a laissé diffuser gratuitement qui plus est, sans subvention des gens insultés, des images qui dénaturent la personne et le message du prophète. Qui sème le vent…

            Est-on bien sûr qu’en 2012 en République française un kilo de plume d’inconséquence vaille un kilo de plomb d’hypocrisie ?

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