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Ordre moral !

Morale« L’ordre moral », voilà une de ces formules employées d’une manière réflexe par le microcosme politico-médiatique français pour dénoncer d’une manière évidente aux yeux de ceux qui l’emploient une horreur de la politique. Cette unanime répulsion repose sur trois présupposés de notre inconscient collectif national. Le premier consiste à penser que la morale est une affaire privée qui ne doit pas être utilisée politiquement. François Bayrou avait cru devoir rappeler les dérapages pédophiles et littéraires de Daniel Cohn-Bendit. La foudre microcosmique suivie de la panurgie sondagière l’ont tout de suite rappelé à… l’ordre. Le second revient à dire que ceux qui dirigent doivent être efficaces et que leurs turpitudes intimes ne regardent qu’eux. La bévue étonnante et pour cela symptomatique de Jean-François Kahn illustre ce principe : Strauss-Kahn est un économiste de niveau international et un homme politique de gauche. Il fait partie du cercle des acteurs et des commentateurs parisiens et on ne va quand même pas l’ennuyer pour un « troussage de domestique ». Intéressant retour du refoulé chez un journaliste de gauche épris de justice sociale… Le troisième support est historique et trouve sa source dans une de ces lectures de l’histoire dont la gauche a le secret, westernienne, avec ses bons, les progressistes, et les méchants, les conservateurs : la troisième République commence par la droite prônant l’ordre moral, et finit avec Vichy, retour à la case départ. Entre deux : l’épopée de la libération laïque et du Front Populaire. Celui qui aurait le malheur de dire que ce régime a conduit à une boucherie et à un désastre militaire sans pareils à travers un cheminement parsemé de scandales, de guerres civiles larvées et de crises gouvernementales incessantes serait aussitôt condamné au silence. L’affaire est donc entendue : ne parlons plus de morale… Quoique… La montée de la violence et de l’irrespect à l’école suggère au ministre qu’on y enseigne la morale… laïque. Ne parlons surtout pas d’ordre, ce terme réactionnaire… Quoique… les bouffées de révolte et l’insécurité permanente de certains quartiers obligent nos responsables politiques à parler d’ordre… républicain.

Nos Précieux Ridicules se complaisent à imposer les mots de gauche. Les mots de « laïque » ou de « républicain » ont la puissance de l’alchimie. Ils transmutent le plomb des valeurs de droite en idées lumineuses et progressistes de la gauche. On aurait aimé dans les salons remplacer la morale, traditionnelle (pouah !), populaire (repouah !) par l’éthique, mais c’est un mot qui franchit mal la porte des salons et ne supporte pas l’air vicié au pied des tours et dans les cités. Va donc pour l’ordre républicain de la morale laïque ! Il était temps ! Car à force d’en vouloir à l’ordre et à la morale, on risquait d’afficher une préférence nette pour le désordre immoral, celui qui conduit à pacifier les quartiers sensibles en légalisant la drogue, par exemple. À force de ne considérer que l’efficacité des résultats sans tenir compte des moyens, on en est arrivé à ce qu’à Lyon, à Lille, à Marseille, des membres des forces de l’ordre soient contaminés par les délinquants qu’ils avaient pour mission de mettre hors d’état de nuire. À force de n’établir aucun rapport entre la vie privée et l’action publique, on a toléré que des hommes de pouvoir se servent des moyens que leur attribue leur autorité pour donner le pire exemple et entacher l’image de notre pays à New York, à Marrakech, ou ailleurs. Tolérance d’autant plus néfaste qu’il s’agit d’hommes d’influence qui pèsent sur nos modes de pensée, sur notre enseignement, sur l’élaboration de nos lois !

Lire la suite de la tribune de Christian Vanneste

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